
« Malheur à vous, docteurs
de la loi et pharisiens hypocrites, qui êtes semblables à des sépulcres
blanchis, qui au dehors paraissent beaux, mais qui au dedans sont pleins
d’ossements de morts et de toute sorte de pourriture (Matthieu 27).
Sidna
Aissa n’a eu que mansuétude, compassion
et amour pour les humbles les rassurant sur la miséricorde divine ; par contre,
il n’a pas arrêté de fustiger et de menacer des pires tourments les pharisiens,
tenants du rigorisme religieux qui avaient fondé un parti politique basé sur la
religion et qui n’arrêtaient pas de diffuser et d’imposer des prescriptions aux
croyants ; corsant à l’extrême la pratique religieuse et éloignant la foi de
son essence pour en faire un puzzle compliqué dans lequel les artifices
corporels, vestimentaires et rituels était conçus comme vecteurs essentiels de
la spiritualité…
On
sait comment l’intégrisme incarné par ces pharisiens réagit alors face à ce
révolutionnaire qui s’était résolument opposé à l’hypocrisie et au culte des
apparats…
Plus
loin, Sidna Brahim dut subir le feu des tenants du rigorisme qui voyaient en
ses attaques contre leur fonds de commerce religieux une menace pour leur
statut de directeurs des consciences de la cohorte humaine dont ils
exploitaient la naïveté et profitaient de la peur, qu’ils entretenaient par la menace des
tourments de l’enfer, en cas de non
inféodation à leurs thèses… Des
tourments qu’ils avaient incrustés dans les subconscients par l’effet d’un
matraquage en règle…
Et
plus près, c’est Sidna Mohamed qui dut lutter devant la coalition tripartite
des idolâtres et des prêtres et rabbins qui, chacun à sa façon, façonnaient les
consciences, à coups de décrets visant à les faire prisonniers de dogmes qu’ils
ne corsaient que pour mieux s’imposer en passages obligés pour les expliciter, se
faisant ainsi représentants inévitables de Dieu sur terre.
C’est
dire que là où il y’a théologie il y’a obligatoirement formation d’un « clergé
» qui la moule selon ses intérêts pour en faire son idéologie, n’hésitant pas à
s’imposer au pouvoir politique et à lui faire adopter ses décrets dans une
alliance de tous bénéfices pour les deux parties…
Quant
cette jonction du spirituel dénaturé et du temporel qui lui est complice se
réalise, le peuple est condamné à boire le calice jusqu’à la lie !... sachant
que tout statisme lui est fatal ; le
pouvoir combiné qui atteint très vite ses limites en matière de gouvernance et
de satisfaction des exigences temporelles de la foule, ne trouve d’autres
alternatives que de rentrer dans la surenchère spirituelle pour la noyer de
rhétorique faute de pouvoir lui assurer l’ordre, la justice et le pain, lui
promettant la félicité de l’au-delà car impuissant à le faire sortir de l’enfer
d’ici-bas.
Il
fait alors feu de tous bois en réexpliquant les préceptes, ajoutant à chaque
fois les notes les plus saugrenues et parfois les plus choquantes, inventant de
nouvelles règles, justifiant l’injustifiable et cherchant une logique
spirituelle à toute incongruité en ayant pour seul fil directeur la volonté de
réduire les libertés humaines en cadrant les convictions et en réglementant les
pratiques dans une seule direction : celle qui fera de l’homme la brebis docile
prête à substituer à son Créateur, le directeur de conscience qui s’en est
proclamé représentant…
Quand
il lui arrive de s’organiser et de se hiérarchiser, ce clergé arrive à se doter
d’une autorité spirituelle (Pape, grand Rabbin, Ayatollah ; Mufti…). Ce n’est
pas pour autant qu’il perd de sa capacité de nuisance, mais il a au moins le
mérite de circonscrire cette nuisance au canal dans lequel elle opère et dont
l’écluse ne s’ouvre et se ferme que par le chef spirituel consacré auquel sont
confiées les clés du pouvoir absolu…
L’alternative
de démocratiser la loi n’est pas pour autant moins néfaste ! Quand ce clergé est livré à n’importe quel «
savant de la foi » on se retrouve en effet
dans une tragique cacophonie …
C’est
précisément la situation que vit l’Islam Sunnite qui, s’il a un Dieu, un
Prophète et des doctrines plus ou moins proches, ne dispose point d’un porte-parole
ou d’une autorité morale consacrée, capable de filtrer, contrôler, censurer les
exégèses; ce qui lui vaut de se faire interpréter par une foultitude de
nouveaux prophètes qui tirent leur notoriété
et souvent aussi leurs richesses de leur fatwas…
Des
fatwas à en veux-tu en-voilà, des fatwas à volonté et dont l’excentricité fait
l’intérêt
; des fatwas qui disent la chose et son contraire, qui justifient ce qui, hier
était tabou, qui autorisent ce qui était
séculairement proscrit ou proscrivent ce qui était séculairement permis. Des
fatwas salaces parce que leurs auteurs savent que la salacité en ces terres de
l’interdit sont payantes, des fatwas misogynes parce que leurs auteurs savent
toutes les frustrations que cultivent leurs auditoires, des fatwas qui font la
part belle aux violences car leurs auteurs connaissent tout le potentiel de
férocité caché par les peuples auxquels elles sont destinées parce que trop
longtemps asservis et brimés…

C’est
cette propension à adapter l’homme à la bassesse de son instinct et non à
l’élever à la hauteur de son esprit qui a permis un jour, en ces terres, à
l’arrogant, tonitruant et haineux
Savonarole qu’est Ali Benhadj de
s’imposer au détriment du monument de modestie, de sagesse et de raison que fut Abderrahmane El Djillali…
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