
Un jeune homme est mort de mort injuste. De ces morts qui vous font crier votre rage devant la cruauté du destin, l’imbécillité de la violence, la perfidie des coïncidences.
Un jeune homme est mort sous le feu d’autres jeunes hommes qui auraient pu être ses amis, ses cousins, ses voisins, ses frères…
Un jeune homme est mort par balle alors que tout le prédestinait à terminer ses jours de mort douce car il n’avait pas d’autres idées que de vivre en respectant la vie d’autrui.
A Azzazga, des jeunes bidasses qui auraient aimé eux aussi, comme nos enfants, comme vos enfants, se dorer sur les plages, se défouler sur des gradins des stades, ou s’éclater dans les cortèges nuptiaux, se sont retrouvés pris sous les feux des rédempteurs de l’absurde. Ils ont tiré dans un moment de panique compréhensible et tué cet homme qui ne devait jamais penser qu’un jour il ferait les frais d’une action dans laquelle il ne s’est trouvé mêlé que parce qu’il était présent au mauvais endroit et au mauvais moment. Les sages disent qu’on n’échappe jamais à son destin… les sages… pas ceux qui, la main en visière, attendent les morts absurdes, à croire qu’ils les souhaitent, pour se donner les bonnes raisons d’extérioriser des pulsions qui n’attendent que l’occasion pour se faire libérer… Ceux là sont trop calculateurs pour croire à la fatalité.
Des hommes ont marché à Azzazga pour témoigner de leur considération au défunt, de leur solidarité à sa famille et de leur ras-le-bol devant cette tragique situation que perpétuent certains cavaliers de l’apocalypse qui jouissent des drames qu’elle crées, des tragédies qu’elle engendre… La dignité de ces hommes n’a d’égales que leur colère devant le combat douteux des irrédentistes de la terreur et leur révolte devant l’immense, intolérable et surtout vain gâchis en vies humaines.
Mais, embusqués parmi les hommes qui ont marché, les sentinelles du chaos ont essayé, comme à chaque fois, d’exploiter la spontanéité et la légitimité de la colère citoyenne pour faire passer leurs messages… cette fois-ci, ils en eurent pour leurs slogans, et les (dé)faiseurs d’opinion, pour les pamphlets de leurs Unes… La colère citoyenne ne s’est pas nourrie des pernicieuses accusations de « complot ourdi » par de présumées officines de l’ombre pour on ne sait plus quelles visées perfides ; le peuple ayant compris que beaucoup d’exhortations ne bénéficiaient en réalité qu’à ceux qui les lancent et non à ceux qui les suivent et que beaucoup de larmes de triste compassion ne sont que des faire-valoir pour l’érection de statuts aux pleureurs quand leur intention déclarée est la construction de statues aux victimes…
En déplorant la mort de Mustapha Dial sans verser dans la surenchère entretenue par certains titres de la presse et par des « émeutistes » qui, sans égards pour sa mémoire et sa famille, ont voulu se servir de son martyre et de la colère, de la tristesse et de l’indignation de ses parents, voisins et amis pour faire passer leurs mots d’ordre, les marcheurs d’Azzazga leur ont administré une belle leçon de sagesse et de responsabilité …
La vox populi a encore une fois disqualifié les pyromanes. Elle a dit son mot sans donner aux incendiaires l’opportunité de se faire ses porte-voix.
Il appartient aux autres foules qu’on n’arrête pas de lever pour des prétextes bien plus égoïstes, de méditer et de prendre exemple sur cette haute leçon de maturité des marcheurs d’Azzazga , pour fustiger autant qu’elles peuvent les inconséquences du pouvoir et les dénoncer avec la plus forte des convictions, c’est cela aussi le devoir de citoyenneté, mais en sifflant les corbeaux de l’opportunisme qui exploitent les tragédies pour s’ériger des tribunes et qui font leur bonheur politique des malheurs des citoyens…
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