Qui connait le bousier ? Dans mon village à la campagne, on l’appelle « boukawwar ». C’est ce petit coléoptère noir, de la taille d’une olive, qui s’est donné pour mission de transformer la bouse en boules…
Il vit en solitaire et ne se regroupe avec ses congénères que quand la vache lui offre la perspective d’un assaut collectif sur une grosse bouse encore fumante… Un cousin avec lequel j’ai fait le berger dans ma prime jeunesse me disait que le bousier devait sentir instinctivement le besoin de la vache de se soulager puisqu’il se présentait par nuées, parfois avant même que la bouse ne touchait terre…
Il en est des bousiers comme des correspondants d’El Djazira…
Cette chaine que l’on a louée trop précipitamment pour son professionnalisme a fini par ne pas attendre que se produise le fait à rapporter pour que ses caméras et ses micros soient déjà en place… c’est à croire parfois, pour ne pas dire souvent, qu’elle n’est pas étrangère à la génération des faits qu’elle rapporte…
Accréditant les mêmes opposants dont elle réussit, à force de matraquage à faire des bêtes de plateau, elle prétend défendre la liberté d’expression quand c’est elle-même qui donne une gueule médiatique au plus insignifiant des déserteurs, une stature de spécialiste au plus fieffé des gredins , une aura de saint à tout charlatan de la foi , une envergure de génie à tout journaleux pelé et qui crée et alimente les controverses, les paradoxes , les inimités et les adversités, jouissant littéralement devant les irréductibilités qu’elle n’arrête pas d’exacerber par le poids des mots, le choc des photos, l’entretien des clivages, le rappel indécent des discordes historiques…
Disposant de ressources dont rêverait Murdoch, cette chaîne est capable d’acheter tous les avis, de s’offrir tous les scoops. En puisant dans les caisses d’un état lilliputien aux entrées faramineuses, elle a totalement détruit les principes de loyauté dans la concurrence qui interdisent la subvention étatique des sociétés commerciales dites « privées ». Cette approche totalement incongrue du droit d’informer a conduit au délitement universel de l’éthique commandant ce droit, et fait courir le risque de revoir les Etats se réapproprier les leviers de l’information pour nous faire revenir aux années où cette information ne se concevait que propagande…
En exploitant sans vergogne les images de mort et de désolation, les scènes d’effroi et de barbarie, El Djazira a, sous prétexte de respect du devoir de vérité, balayé tout devoir de retenue et de respect des consciences des vivants et de décence devant les morts. Son exposition des têtes coupées, des entrailles éviscérées, des membres éparpillés et du sang répandu a banalisé la violence en habituant le téléspectateur à des « Guernica » récurrents. Ses accointances avec l’extrémisme lui ont permis par ailleurs d’avoir la primauté des vidéos des carnages qu’il commet, l’exclusivité littérale des rencontres avec les assassins et de se faire littéralement leur porte-parole en se faisant choisir comme boîte aux lettres par tous les hirsutes exécuteurs de basses besognes…
Mais pourquoi cette frénésie médiatique moderniste d’un émirat qui reste médiéval dans ses formes de gouvernance ? Quel intérêt trouve donc le Qatar dans cette « institution » médiatique disproportionnée par rapport à sa taille, à sa force, à son influence et dans cet investissement morbide dans la déstabilisation, la destruction et la terreur?
En réalité, le Qatar est un pays artificiel… il n’existe que parce qu’on s’en accommode ; parce que ses richesses s’investissent dans les opérations économiquement rentables pour l’occident et par ce souci du monde se prétendant civilisé, d’éviter ses erreurs du passé qui l’ont poussé à faire les sales besognes par ses peuples, à les subventionner par ses moyens et à assumer seul les conséquences morales de ses guerres.
Le Qatar et el Djazira ont été montés de toutes pièces pour les besoins de la cause du monde dit « civilisé » afin d’instaurer l’instabilité chronique dans ces contrées du Sud qui ont plus besoin d’un plan Marshall pour rattraper l’immense retard technologique, infrastructurel et social que de démocratisme débridé qui entretient surtout les clivages raciaux, tribalistes, régionalistes, ethniques et religieux et qui ne donnera aux peuples ni le confort ni la pitance mais seulement une illusion de liberté qui ne fera pas d’eux de meilleurs cadavres…
Il y’a fort heureusement des prémices d’une prise de conscience qui se manifeste avec conviction et résolution chez ces peuples et, au vu de la perte d’audience de cette chaine qui se prétend libératrice et qui mobilise ses nuées de bousiers à chaque fois qu’elle sent une odeur d’excrément, il faut espérer que nous constaterons bientôt les effets du vrai printemps qui nous débarrassera enfin de cette gorgone et de tous les acteurs de nos tragédies qu’elle a réussi à créer en leur donnant l’hospitalité de ses plateaux , la publicité pour leurs méfaits et peut-être aussi les moyens matériels et financiers de leur vilaine politique.
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