
La tripartite de l’après-émeutes, annoncée à grand renfort de publicité et avec force promesses de bonnes surprises pour ses trois composantes, comme si ses trois composantes n’étaient pas aussi interdépendantes que des vases (financiers) communicants, imposant à la victoire d’une partie une défaite proportionnelle aux autres, s’est terminée par des cocoricos enroués qu’une bonne partie de la presse a qualifiés de «décisions importantes pour l’entreprise »…
L’accent a été particulièrement mis sur l’abandon partiel des contraintes imposées par le Gouvernement en matière de formalités de paiement des importations de matières dites « premières » et autres inputs.
La formule de paiement différé que l’Etat avait suspendue afin de « mieux maitriser ses volumes d’échanges » et dont la décision fut en son temps applaudie presque à l’unanimité par les analystes de la chose économique qui y voyaient une « reprise en main » d’un segment vital de souveraineté nationale par l’Etat, fut par la suite considérée comme la principale source de blocage de la vie économique et dénoncée d’abord timidement puis avec un acharnement qui allait crescendo par les opérateurs, leur presse, leurs partis politiques et… les organisations occidentales de défense des libertés publiques qui y voyaient une autre manifestation de l’interventionnisme gouvernemental, pêché mignon des régimes « totalitaristes » mais pêché capital aux yeux des partisans du capital et de la « liberté d’entreprendre ».
L’opinion publique eut droit à un véritable matraquage médiatique qui fut aussi sinon plus intense que celui qu’elle dut endurer devant les appels à la levée de l’Etat d’urgence par les activistes de tous bords qui trouvaient que cette disposition légale appliquée pourtant dans ses aspects strictement sécuritaires constituait une chape de plomb sur leurs libertés politiques…
La Tripartite ne s’est retrouvée prisonnière de la quasi exclusivité de cette revendication que parce que la composante de ses parties, inamovibles depuis des décennies, n’est représentative que des intérêts de ses sempiternels acteurs : des dirigeants syndicaux et patronaux datant du jurassique. Ces spécialistes es-reconduction qui occupent leurs sièges en potentats inamovibles, participent depuis des lustres - intuitu-personae - à ces joutes où ils ne défendent une mesure que pour mieux la pourfendre au prochain round, faisant preuve d’une courte vue déplorable pour des acteurs économiques et sociaux que doit pourtant caractériser essentiellement le souci de prospective.
Car les travailleurs et les entreprises, eux, sont totalement absents des débats ; les premiers beaucoup mieux défendus par la foultitude de « syndicats autonomes » qui ne doivent leur existence qu’à la léthargie d’une UGTA plus encline à gérer les carrières de ses cadres que les revendications de ses adhérents ; les secondes, déconnectées dans leur immense majorité de ces organisations patronales qui ne représentent qu’une « élite » trop bien introduite pour être gênée par les tracasseries bureaucratique d’une administration qui ne desserre une main de la gorge de l’entreprise que pour mieux l’agripper de l’autre.
Les problèmes des travailleurs réalisant une véritable valeur ajoutée sont appelés à devenir dans un proche avenir asphyxiants du fait de la distorsion salariale causée par les augmentations démentielles concédées aux secteurs non productifs par les démembrements institutionnels de l’Etat, qui vont de surenchères en surenchères sans calculer l’impact de ces gratifications sur la dette intérieure et leurs retombées en termes inflationnistes. Le déséquilibre ainsi généré entre les salaires indexés sur la plus value réellement dégagée par le travail et ceux distribués sur les budget de l’Etat risque d’être fatal à toutes les entreprises déjà laminées par des charges fiscales et parafiscales très lourdes et une concurrence déloyale imposée par un secteur informel florissant et des outputs de contrefaçon et de contrebande qui débordent des étals des magasins pour envahir rues et placettes dans un pays qui se « basardise » à la vitesse d’un marché informel d’une banlieue populaire…
L’Entreprise Algérienne, ou du moins sa très large composante ne bénéficiera d’aucun impact des décisions de la tripartite. Le Credoc n’a jamais été le souci des milliers d’entreprises publiques et privées qui constituent le réel tissu industriel du pays, celui qui crée l’emploi et la plus-value et qui prémunit l’économie contre toutes les crises économiques et sociales… Les autres mesures relatives aux relations banques –entreprises, elles aussi ne profiteront pas au gros des opérateurs mais seulement aux gros opérateurs économiques, les premiers n’étant que peu endettés du fait du refus de financement qu’ils ont toujours essuyés contrairement aux seconds qui ont toujours pu se servir en servant… Quant aux réels soucis de ces entreprises, la tripartite les a évacués en les confiant à des « commissions thématiques » qui rendront leur conclusions en septembre… quand on sait le sort consacré aux questions confiées depuis 1962 aux commissions de toutes natures, on peut deviner ce qu’il en sera de ces questions…
Avec le recul, en voyant sur quels consensus se sont entendus les acteurs de cette tripartite, on peut retirer une conclusion aussi nette qu’un niet d’Ouyahia… En réalité le tapage qui l’a précédé ne visait qu’à infléchir la détermination du gouvernement sur la question du Crédoc par les gros importateurs, inamovibles présidents des associations patronales ; les problèmes de l’entreprise et de ses travailleurs ne constituant qu’un faire-valoir… Le résultat ne pouvait être que ce statuquo édulcoré par des « mesurettes » ; juste pour faire bonne mesure.
L’Entreprise Algérienne aujourd’hui livrée à la gestion (et à l’appétit) de fonctionnaires qui la tiennent en haute suspicion et qui n’arrêtent pas de l’enfermer dans les carcans de la bureaucratie ne devra sa survie et son expansion qu’à une réelle représentativité et à un plan de bataille qu’elle se doit de confier à ses propres servants et non à des fondés de pouvoir qui n’enfourchent ses causes que pour défendre les leurs… Les entrepreneurs qui crapahutent dans les sentiers escarpés d’une gestion que la bureaucratie rend chaque jour un peu plus contraignante doivent prendre en main avec courage, obstination et conviction le devenir de l’ entreprise en instaurant d’abord une réelle démocratie dans ces organisations patronales qui parlent en leurs noms sans poser leurs vrais problèmes ni défendre leurs réels intérêts…
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