mercredi 15 juin 2011

OUYAHIA ET LES SENIORS



En régisseur suprême de tous les secteurs de l’activité économique et sociale, Ouyahia despotique et arrogant comme tout énarque qui se respecte en ne croyant à nulles autres options que les siennes, vient d’entériner les nouvelles aides publiques aux entreprises économiques pourtant autonomisées à coup de milliards de dinars. Des Entreprises sous perfusion permanente, non pas pour quelque atavique pulsion au farniente de leurs travailleurs ni pour quelque incompétence congénitale de leurs responsables mais parce qu’elles doivent évoluer dans un système hybride où la fiscalité, la parafiscalité, le respect des prescriptions légales en matière de gestion du personnel et de la commercialisation les mettent en position de précarité permanente face à un marché informel qui ne s’embarrasse d’aucune règle, surtout depuis l’avènement du terrorisme islamiste puis de la contestation sociale débridée qu’on appelle « printemps arabe ».

La situation de non-droit qu’imposent ces deux phénomènes ne profite pas du tout à tous ceux qui n’ont d’autres alternative que celle de la transparence des actes et des comptes et ce ne serait pas aller trop loin que de conjecturer sur la source de cette situation en répondant très simplement à la question consacrée : « à qui profite le crime »….

Il est évident que ce décollage de l’économie qui ne veut absolument pas venir ne provient justement que de cette propension à vouloir mettre dans le même panier des acteurs qui n’ont pas les mêmes méthodes ni les mêmes objectifs ni la même liberté d’action. Et l’Entreprise Publique, enfermée dans des carcans réglementaires antinomiques avec la nécessité de liberté d’action sans laquelle aucune expansion n’est permise, n’a constitué , ne constitue et ne constituera qu’une sorte de « réservoir » qui ne sert qu’à nourrir les larves des entreprises privées qui sortiront de son corps grassouillet comme les larves de certains insectes sortent des corps dans lesquels les œufs ont été mis à incuber…

Il faut en effet être aveugle pour ne pas voir comment l’ENPC, l’ENCG, l’ENS, l’ENC, la TPL, La SEMPAC et autres sociétés qui un jour furent des Entreprises de grande importance économique et sociale même si elles n’obtenaient pas de grands résultats financiers car leur vocation, du fait de la politique de l’emploi, de la formation, de la distribution, de la régulation etc… ne leur imposaient pas du tout le bénéfice commercial comme objectif , il faut être aveugle disons-nous pour ne pas admettre que quasiment TOUTES les petites ou grandes sociétés privées qui opèrent parfois avec beaucoup de bonheur dans leurs secteurs n’ont ramené leurs cadres et travailleurs de nulle part mais de leurs seuls ateliers et staffs, profitant de qualifications pour lesquelles elles n’ont pas dépensé le moindre sous vaillant et que même les équipements ont été allègrement transvasés de ces entreprises publiques où ils étaient parfois classés désuets ou obsolescents pour retrouver sous la férule de leurs ex-nouveaux servants une vitalité qu’ils n’avaient perdue que pour justifier leur cession…

Il en fut de même pour l’entreprise étrangère qui, en rachetant certaines de nos sociétés n’a payé que le foncier et les équipements et peut-être le fond de commerce évalué à sa plus faible expression – par des bureaux d’études étrangers - mais pas du tout les compétences formées durant des décennies.

Mais le mal que connaissent nos entreprises publiques du fait de leur statut et qu’on n’a pas arrêté d’imputer à leurs dirigeants en les envoyant par fournées entières devant des juges très peu au courant de la chose économique et qui n’hésitaient pas et n’hésitent toujours pas à user de détention préventive, de contrôle judiciaire et de mandat de dépôt pour des broutilles, ce mal se trouve amplifié par les décisions totalement incongrues d’une tutelle administrative qui crie à l’autonomie sans pouvoir se départir de ses tentations tutélaires.

La dernière circulaire de Monsieur Ouyahia qui enjoint aux responsables publics de libérer illico les « séniors » est un exemple de ces décisions dites « sociales » qui interfèrent dangereusement dans l’impératif économique sans régler ni le problème social ni conférer une plus grande efficacité économique.

Des entreprises publiques totalement déshabillées par leurs concurrentes privées et étrangères offrant aux cadres et travailleurs des avantages non régis par une quelconque lourde grille indiciaire, se voient aujourd’hui contraintes de se débarrasser sans autre forme de procès de ces compétences que la providence des retraites anticipées lui a offertes, pour se remettre à recruter à leurs places des nouveaux diplômés qui iront grossir le rang de ces entreprises privées dès qu’ils auront acquis l’expérience et le savoir-faire nécessaires… C’est ce qu’on appelle « men lehytou bakharlou » (de sa barbe lui faire des fumigations) dans une expression de notre cru.

Pourquoi cette décision ?... Pourquoi l’imposer aux entreprises publiques ? Les réponses très simplistes comme on peut le deviner ne dérogent pas aux idées démagogiques et populistes qui ont souvent caractérisé les décisions de nos fondés de pouvoir. A la revendication de l’arrêt du népotisme dans les recrutement au Sud, l’Etat a réagi par la loi n° 04-19 du 25 décembre 2004, imposant A TOUT LE MONDE (Art 18) la mise en concurrence des candidats potentiels A TOUS LES POSTES et quand des ministres n’ont pas hésité à confier à leurs progénitures des postes de « chargés d’études » on a vu des Inspecteurs du Travail verbaliser à tout va des boulanger et des soudeurs pour avoir recruté leurs propres enfants afin de leur transmettre leur savoir-faire, sans passer par l’offre d’emploi à déposer à l’ANEM du coin… Cette Loi n’a absolument pas réglé le problème du népotisme, tout au plus a-t-elle ajouté une touche bureaucratique, favorisant ainsi l’emploi informel, ouvrant encore une possibilité de corruption de fonctionnaires et surchargeant inutilement les tribunaux pour faire rendre gorge aux plus fragiles et aux moins « introduits » des employeurs…

Les séniors qui veulent encore faire profiter l’économie du pays de leur savoir et que Ouyahia veut envoyer grossir les usagers des bars, des cafés maures et des bancs publics, le rang des trabendistes de tous poils, celui des pêcheurs à la ligne et celui des fidèles en kamis attendant les horaires des prières pour tuer le temps dans les mosquées, ces séniors ne peuvent même pas faire profiter la société civile de leur sagesse en s’investissant dans des associations puisque l’agrément de ces dernières n’est toujours pas évident.

Passe s’il avait enjoint aux seules administrations publiques de ne plus recourir à la pratique du recrutement contractuel de leurs séniors qui ne peuvent ramener qu’une plus-value à une bureaucratie déjà excessive ; mais en imposant cette décision à l’EPE ou à l’EPIC, Ouyahia a vraiment tiré à côté et, par respect pour ces séniors, par respect pour les lois imposant l’autonomie de décision des responsables, par respect pour l’efficacité attendue de ces entreprises, Ouyahia devrait rectifier son tir si son arrogance d’énarque lui permet encore de croire en d’autres vérités que celles dont il se croit unique détenteur…

Et si cette décision lui parait opportune, qu’il la généralise à tous les séniors en activité, à commencer par les walis, ministres, ambassadeurs et consuls du gouvernement dont il a la charge.

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