vendredi 2 décembre 2011

ARABERIES

Nos frères les arabes, que Dieu les garde, n’ont pas seulement découvert le zéro et l’astrolabe; ils ont aussi trouvé depuis longtemps la formule qui permet à leurs fondés de pouvoir de se remplacer dans une douce alternance ou de se perpétuer dans une continuité très bien huilée où les quelques grincements de dents qu’elle engendre sont étouffés par les claquements des mains et les youyous de béatification. Les rois, émirs et présidents se laissent vieillir au pouvoir et leurs peuples, "partiarchalisés" jusqu’à la caricature et auxquels on a fait comprendre depuis toujours que le père est indispensable non seulement à leur bonheur mais aussi à leur survie, les idéalisent au point d’en faire de véritables totems vivants. Lorsque le bon père de la nation décide de se donner un coup de jeune en se faisant replébisciter ou vient à disparaître brutalement pour cause de maladie ou d’intrigue de palais, on rameute tous les faiseurs de spectacle pour organiser de grands shows à la gloire ou à la mémoire du Manitou selon qu’on veuille lui redorer le blason par un nouveau mandat ou lui construire une légende pour son repos éternel. On réussit alors à lui trouver - même en les inventant de toutes pièces - tous les mérites de sagesse, bonté, magnanimité, tolérance, pardon, piété... C’est un ange qu’on découvre même s’il a toute sa vie, traîné le diable par la queue... C’est dans ces hauts moments de profonde symbiose entre la canaille et son pays éprouvé ou angoissé qu’on reconduit l’élu ou qu’on sort le régent qui, avec sa gueule de circonstance est vite intronisé et qu’on présente comme digne successeur de lui-même, et qu’on n’arrête pas de louer; ou de celui qui l’a précédé, et qu’on n’arrête pas de pleurer. Quand le peuple s’éveille avec une grosse gueule de bois à force d’entendre les dithyrambiques louanges en langue du même matériau, il est déjà trop tard. Du rameau d’olivier si superbement exhibé hier, il n’aura que l’olive. Le nouveau chef qui s’est bien calé dans son trône a déjà commencé à se fabriquer une personnalité - généralement en détruisant celle de celui qui l’a précédé (même si c’est lui-même) et qui lui fait trop d’ombre. Et nous voilà repartis pour une autre grande avancée à rebours... Article publié en son temps dans "El Manchar"

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